Conférence sur la Palestine interdite à Lille : on rembobine la polémique

Par La Provence

La militante franco-palestinienne Rima Hassan, actuellement candidate aux européennes sur la liste LFI et le leader La France Insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon.

La militante franco-palestinienne Rima Hassan, actuellement candidate aux européennes sur la liste LFI et le leader La France Insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon.

Photo AFP et La Provence (David Rossi)

Prévue initialement jeudi 18 avril, une conférence sur "l'actualité en Palestine" qui devait avoir lieu au sein de l'université de Lille a été annulée par son président. Les uns criant à la censure, les autres saluant une décision juste. On vous récapitule la polémique.

À l'origine, c'est une conférence organisée à l'initiative d'une association étudiante pro-Palestine avec comme invités le leader La France Insoumise (LFI) Jean-Luc Mélenchon et la militante franco-palestinienne Rima Hassan, actuellement candidate aux européennes sur la liste LFI.

Une réunion publique à l'université de Lille sur "l'actualité en Palestine"

Une réunion publique autour de "l'actualité en Palestine" et de la volonté d'un cessez-le-feu immédiat et permanent qui a mis le feu aux poudres dans la classe politique. En cause, un logo figure un territoire englobant Israël, la Cisjordanie et la bande de Gaza, sur lequel est apposé le nom de l'association "Libre Palestine".

Une partie de la classe politique réclame l'annulation

"Nous ne pouvons tolérer, dans une université française, une telle conférence de La France insoumise, de Jean-Luc Mélenchon et de Rima Hassan qui, à travers le logo 'Libre Palestine', nient l'existence de l'État d'Israël", avait rapidement réagi lundi 15 avril sur X le président (LR) des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, réclamant son annulation.

Une demande partagée par de nombreux élus RN mais également Renaissance comme la députée, Violette Spillebout. Cette dernière avait écrit au président de l'université de Lille afin de demander l'annulation de cette conférence, soulignant la "très lourde responsabilité" de LFI "dans l'explosion antisémite en France".

La préfecture du Nord a notamment justifié son interdiction par "des appels à la mobilisation lancés par plusieurs organisations" opposées à la conférence, comme l'Union nationale inter-universitaire (UNI) ou l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), pouvant entraîner "des heurts sur la voie publique".
La préfecture du Nord a notamment justifié son interdiction par "des appels à la mobilisation lancés par plusieurs organisations" opposées à la conférence, comme l'Union nationale inter-universitaire (UNI) ou l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), pouvant entraîner "des heurts sur la voie publique". Photo DR

L'université annule la conférence

La députée du Nord aura gain de cause. Mercredi, l'université de Lille a décidé d'interdire la conférence qui devait avoir lieu en son sein. "Les conditions ne sont plus réunies pour garantir la sérénité des débats" en raison de la montée "préoccupante" des tensions internationales après "l'escalade militaire intervenue les 13 et 14 avril au Moyen-Orient", a souligné l'université dans un communiqué.

La préfecture du Nord a notamment justifié son interdiction par "des appels à la mobilisation lancés par plusieurs organisations" opposées à la conférence, comme l'Union nationale inter-universitaire (UNI) ou l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), pouvant entraîner "des heurts sur la voie publique".

Les tensions à gauche ravivées

Même à gauche, Jérôme Gudej ou Raphaël Glucksmann ont fustigé la stratégie de LFI. Raphaël Glucksmann a regretté mercredi soir sur TF1 que Jean-Luc Mélenchon "s'affiche" avec le logo d'une association "qui nie l'existence de l'État d'Israël". "Quand on est un parti politique, on ne s'affiche pas avec des logos qui nient l'existence de l'Etat d'Israël. C'est aussi simple que ça", avait estimé la tête de liste des socialistes aux élections européennes.

"Ça participe de la confusion générale de La France insoumise et de Jean-Luc Mélenchon sur la question israélienne. Depuis le 7 octobre, il y a un problème. Nous, nous n'avons pas bégayé pour condamner les attaques terroristes du Hamas", a ajouté Raphaël Glucksmann en référence au refus de la direction de La France insoumise de qualifier l'organisation islamiste de "terroriste". "Nous n'avons pas bégayé non plus pour condamner les crimes commis par Israël à Gaza", a-t-il également précisé.

Rassemblement dans un "nouveau lieu" et "abus de pouvoir" du préfet

Suite à la décision d'annulation de la réunion à l'université lilloise, le chef de file de La France Insoumise a contre-attaqué et avait annoncé maintenir la tenue de la conférence à Lille mais "dans un nouveau lieu".

"Nous ne nous tairons pas. La conférence de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan se tiendra à Lille ce jeudi 18 avril. La communication sur le nouveau lieu sera envoyée aux inscrits", a expliqué LFI dans un communiqué en ciblant "la présidence de l'université qui se montre incapable de résister aux pressions qui s'attaquent à la liberté d'expression".

Après l'université, c'est au tour de la Préfecture d'annuler la conférence jeudi alors qu'elle devait se tenir le soir même dans la capitale nordiste. Dénonçant "un abus de pouvoir de république bananière" de la part de la Préfecture, Jean-Luc Mélenchon a donné rendez-vous pour un rassemblement public à la même heure dans la rue "contre la censure et pour la paix".

"Chacun puisse exprimer sa voix", estime Emmanuel Macron

Le président de la République, Emmanuel Macron, avait tenu à s'exprimer sur le sujet jeudi. Le chef de l'État souhaite que "chacun puisse exprimer sa voix" dans la campagne des européennes alors qu'avec les Insoumis, Eric Zemmour s'est également vu interdire une réunion publique à Bruxelles. "Je suis pour qu'on respecte les lois de la République. Après, je suis pour ma part toujours favorable à ce que les gens puissent s'exprimer librement, quand bien même je combats leurs idées", avait déclaré le président lors d'une conférence de presse jeudi à l'issue d'un sommet européen.

Le président de l'université et Adolf Eichmann

Durant le rassemblement de dernière minute, Jean-Luc Mélenchon a emprunté des termes imputés à Adolf Eichmann, haut dignitaire du régime nazi et responsable logistique de la "solution finale", pour parler du président de l'université lilloise. "'Moi je n'ai rien fait', disait Eichmann. 'Je n'ai fait qu'obéir à la loi telle qu'elle était dans mon pays'. Alors ils disent qu'ils obéissent à la loi et ils mettent en œuvre des mesures immorales qui ne sont justifiées par rien ni personne", avait-il déclaré jeudi à Lille, semblant établir une comparaison avec le président de l'université qui a annulé la conférence qu'il devait initialement tenir. Des propos qui ont ravivé une nouvelle polémique.

Rima Hassan présente à Marseille ce week-end et bientôt convoquée par la justice

Rima Hassan, juriste franco-palestinienne et candidate de La France Insoumise aux élections européennes, effectue une série de réunions publiques autour de la cause palestinienne dont elle est chevillée au corps. Elle sera à Marseille dès ce vendredi pour participer à une opération "porte à porte" mais également sillonner plusieurs communes du département avant de se rendre dimanche après-midi à la manifestation "pour un cessez-le-feu" au Proche-Orient à Marseille.

Rima Hassan a aussi été convoquée par la police ce vendredi pour "apologie du terrorisme". Révélée par Le Monde, la militante controversée, par ailleurs juriste et spécialiste de la question des réfugiés, est convoquée à la fin du mois d'avril "afin d'être entendue librement sur des faits d'apologie publique d'un acte de terrorisme, commise au moyen d'un service de communication au public en ligne". Les faits qui lui sont reprochés auraient été commis entre le 5 novembre et le 1er décembre 2023, selon le document. Rima Hassan a dénoncé sur X "des manœuvres purement politiciennes visant à compromettre (sa) liberté d'expression sur la Palestine".

Une campagne pour le moins agité pour la gauche radicale.